Charte de la MMSP
Version votée en AG de mars 2014
PREAMBULE :
La charte situe le projet de l’équipe de la Maison Médicale Santé Plurielle (MMSP) dans la société et traduit la manière dont l’ensemble des travailleurs de la Maison Médicale (MM) et des représentants des patients mènent une réflexion collective en prise avec la réalité économique, sociale, culturelle et environnementale et avec son évolution, et ce dans le cadre de la dispensation de soins de santé primaires, tels que définis ci-dessous.
OBJET SOCIAL :
- La charte fonde et éclaire notamment les statuts de l’Association Sans But Lucratif (ASBL) ; elle suppose l’adhésion de chaque participant au projet collectif de la MMSP. Elle est le fruit d’un travail initié depuis de longues années, donne les repères, le sens de l’action menée et affirme le lien et les valeurs qui unissent l’équipe de la MMSP.
- Cette dernière s’inscrit dans le cadre de la santé communautaire et dans une volonté de participer à une transformation sociétale et sociale vers une « troisième voie » ni libérale, ni totalitaire.
Cette « troisième voie » doit garantir, de manière complémentaire des valeurs progressistes collectives dans la société, au terme le plus proche possible, et des valeurs progressistes individuelles au sein de la MMSP, appliquées dès sa constitution, dans son fonctionnement institutionnel.
Les valeurs collectives consistent, notamment, en l’organisation d’une pratique d’autogestion, de rotation des responsabilités, la solidarité, la justice, l’égalité et l’équité, l’absence de hiérarchie, la communication et la collaboration bienveillantes, le respect des patients et des collègues dans la pratique professionnelle, l’ouverture aux différences culturelles, sociales, intellectuelles, l’intégration de l’usager comme un partenaire à part entière donc un acteur de santé.
Les valeurs individuelles consistent, notamment, en l’épanouissement personnel dans le cadre du projet et la pleine participation à celui-ci, la rémunération équitable et satisfaisante dans le cadre d’une tension barémique minimale.
- Dans la perspective d’un travail en santé communautaire dirigé préférentiellement vers le psychosocial, il est nécessaire de développer différentes formes de dialogue avec la population et ses représentants pour tenter d’accorder au mieux nos pratiques de soins aux besoins rencontrés sur le terrain et de pouvoir les évaluer et les ajuster. Ainsi, par une prise en charge plus grande de ses problèmes de santé, la population améliorera sa responsabilisation et s’inscrira dans une démarche d’autonomie dans un cadre globalisant.
- Un engagement politique militant personnel est évidemment possible pour autant qu’il n’implique pas la MMSP de manière institutionnelle.
- La participation de la MMSP à la transformation sociétale et sociale, qui permet une amélioration de l’état de santé de la population, s’articule, d’une part autour de la dispensation de soins de santé primaires globaux, continus, intégrés et accessibles à travers une équipe pluridisciplinaire travaillant en transdisciplinarité et, d’autre part, autour de la participation concrète à toute action visant à modifier favorablement les facteurs influençant la santé (ex : projet collectif de mise sur pied d’un observatoire de la santé, soutien actif à l’action communautaire et à la promotion de la santé, de l’éducation permanente, de la participation citoyenne, collaboration avec des politiques publiques locales, régionales, communautaires ou fédérales développant ces principes et projets.
- Dans cette perspective, la MMSP souhaite développer des synergies avec les autres MM couvrant le même territoire, partager des réflexions avec celles qui œuvrent dans des conditions analogues et, avec d’autres professionnels de la santé, créer, soutenir ou s’intégrer aux partenariats avec les organismes, associations ou institutions actifs sur le territoire tels que les Missions locales, Maisons de quartier, Centres de santé mentale, Centres psycho-médicauxsociaux (CPMS) et établissements scolaires, services sociaux, etc.
En outre, la MMSP est attentive aux questions de santé dans le monde et s’efforcera de participer à des actions d’échanges Sud-Nord, en pratique de soins primaires.
LES SOINS DE SANTE PRIMAIRES
« Les soins de santé primaires sont des soins de santé essentiels fondés sur des méthodes et des techniques pratiques, scientifiquement reconnues et socialement acceptables, rendus universellement accessibles à tous les individus et à toutes les familles de la communauté avec leur pleine participation et à un coût que la communauté et le pays puissent assumer à tous les stades de leur développement dans un esprit d’autoresponsabilité et d’autodétermination. Ils font partie intégrante tant du système de santé national, dont ils sont la cheville ouvrière et le foyer principal que du développement économique et social d’ensemble de la communauté. Ils sont le premier niveau de contact des individus, de la famille et de la communauté avec le système national de santé, rapprochant le plus possible les soins de santé des lieux où les gens vivent et travaillent, et ils constituent le premier élément d’un processus ininterrompu de protection sanitaire « (Alma Ata, OMS 1978) .
Ce texte princeps implique que les soins de santé primaires :
- soient fondés sur les résultats de la recherche médicale et en santé publique ;
- soient orientés sur les principaux problèmes de santé publique de la communauté ;
- incluent éducation, vaccinations, accès à l’eau potable, alimentation, protection maternelle et infantile, hygiène, accès aux soins de base ;
- fassent intervenir, outre le secteur de la santé, tous les secteurs et domaines connexes du développement national et communautaire, en particulier l’agriculture, l’élevage, la production alimentaire, l’industrie, l’éducation, le logement, les travaux publics et les communications, tout cela en coordination ;
- incluent la participation des individus et des populations concernées à la planification, à l’organisation, au fonctionnement et au contrôle des soins de santé primaires ;
- soient intégrés à des systèmes d’accès aux soins accessibles à tous et accordant la priorité aux plus démunis ;
- fassent appel aux personnels de santé
– médecins, infirmières, sages-femmes, auxiliaires et agents communautaires, selon le cas, ainsi que s’il y a lieu, praticiens traditionnels, travaillant en coordination et en réponse aux besoins de santé exprimés par la collectivité.
Soins de santé primaires, soins de première ligne, soins du premier niveau, soins essentiels, recouvrent des concepts similaires.
LES VALEURS AUXQUELLES ADHERENT LES MEMBRES DE L’EQUIPE DE LA MMSP :
Les énergies, pour mettre en œuvre le projet de la Maison Médicale, sont les valeurs fondamentales définies et partagées par toute l’équipe. Ces valeurs sont applicables tant à la dynamique d’équipe qu’aux missions.
- Le Respect des différences sociales, culturelles, psychiques, physiques, philosophiques et politiques. Dans un souci de pluralité, la Maison Médicale attache plus d’importance à l’accord réel existant entre ses membres sur des objectifs fondamentaux qu’à leur appartenance à un groupe politique, syndical ou à un courant philosophique ou religieux. La Maison Médicale travaille dans un esprit d’ouverture. Ce qui implique une concertation permanente basée sur le respect et l’écoute de chacun ainsi que le respect des divergences dans les limites des valeurs exprimées dans cette charte. Sa conception de la pluralité de gauche repose également sur son refus des dogmatismes et des intégrismes ainsi que son positionnement en faveur de la laïcité politique, des Droits de l’Homme et de ceux à l’avortement et à l’euthanasie.
- La Confiance en l’autre et en ses compétences. La Maison Médicale veut reconnaître le travail de chacun, selon une variété de fonctions et de compétences chacune indispensable dans une équipe pluridisciplinaire, et non, selon une hiérarchie et un cloisonnement des tâches basées sur le diplôme ou le pouvoir qu’il donne. – La Solidarité au sein de l’équipe et entre les patients. Cette solidarité se traduit entre autre par le choix du mode de financement, le forfait, ceci afin de susciter plus de solidarité au sein de la communauté.
- La Justice sociale La Maison Médicale soutient et participe à des actions visant à favoriser l’épanouissement et la qualité de vie de chaque individu dans la société. Elle défend, également, l’accès au droit pour tous (ex : accompagner et donner les outils et les informations nécessaires aux personnes dans leurs démarches sociales et juridiques).
- L’Engagement La Maison Médicale se veut un lieu où chacun puisse donner le meilleur de lui-même. Elle soutient une exigence d’investissement. Chaque travailleur est responsable de son travail et 3 du projet collectif dans un esprit de respect, d’écoute et de concertation. Travailler à la Maison Médicale suppose donc d’en devenir membre ainsi que d’adhérer et de porter la présente charte.
- La Convivialité Pour la Maison Médicale, la convivialité signifie le plaisir de travailler ensemble, avec une communication bienveillante.
- Le Dynamisme et la créativité Il est primordial d’éviter de figer des décisions ou des procédures ainsi que les comportements. Il faut, sans cesse, reposer la question de la pertinence des décisions, procédures ou comportements dans le temps et utiliser l’évaluation comme outil de travail et de critère de qualité.
- La responsabilité Chaque travailleur est responsable de l’institution sur le plan institutionnel et sur le plan politique interne et externe (image et place de l’institution au niveau local et régional). Il ne peut engager la MM ni sa responsabilité, dans le cadre de l’action militante autorisée et publique.
- L’autonomie La Maison Médicale a pour mission d’être à l’écoute des patients ; elle soutient et augmente leurs compétences personnelles en leur donnant les outils nécessaires pour atteindre leur autonomie (dans le sens du libre choix).
- L’écologie politique La Maison Médicale favorise durablement une consommation responsable, le respect de l’environnement ainsi que la préservation des ressources naturelles et humaines.
La Maison Médicale se définit, donc, comme autogestionnaire afin de consolider les valeurs d’engagement, de responsabilité, d’autonomie, d’initiative et de créativité ainsi que son mode de fonctionnement interne.
La Maison Médicale a une réelle volonté de dispenser les soins de santé de première ligne par une équipe pluridisciplinaire dont le travail s’effectuera en transdisciplinarité :
Le concept de transdisciplinarité implique plus qu’un meilleur fonctionnement entre plusieurs disciplines co-existantes :
- La pluri- ou multidisciplinarité : fait travailler des disciplines différentes sur un thème commun. Les compétences et les savoirs ne sont pas les mêmes dans les disciplines, et coexistent le plus souvent sans se pénétrer.
- L’interdisciplinarité : cherche à construire une représentation commune et un projet commun, en confrontant et en faisant se pénétrer les représentations de chaque discipline.
- La transdisciplinarité : cherche à unifier tous les savoirs disciplinaires pour construire une culture, des représentations et des projets communs dans lesquels chaque discipline nourrit et enrichit les autres, en permettant le réinvestissement réciproque des compétences.
C’est une attitude : échanger sa paire de lunettes avec l’autre, ne pas figer les frontières entre les métiers, être conscient des conséquences de son travail sur celui des autres, collaborer et coconstruire un projet avec le patient, intégrer la vision sociale, etc. La transdisciplinarité implique le partage des connaissances, la continuité des soins, le respect des horaires, des locaux et du matériel, la tenue commune des dossiers au travers de l’utilisation du dossier santé informatisé (sauf le secteur psychologique), le respect des consignes de travail de l’accueil, notamment l’utilisation de l’agenda commun, ainsi que la participation aux discussions de cas organisées lors des réunions.
L’équipe de la Maison Médicale s’appuiera aussi sur des critères de qualité :
- La pertinence : C’est la première question qui se pose sur un projet : cela vaut-il la peine de le mettre en place ; le projet répond-t-il à un réel problème, observé par les soignants et/ou exprimé par les patients (pertinence des buts) ? Les méthodes proposées, ou déjà mises en place, sontelles adéquates ? (pertinence des stratégies et méthodes).
- L’efficience : Elle représente le rapport entre l’efficacité et le coût (en temps, en argent, en énergie). – La globalité : Articule la santé et le social ; elle consiste à envisager l’ensemble des aspects des problèmes de santé présentés par les patients, qu’ils soient physiologiques, organiques, familiaux, sociaux, psychologiques, économiques ou culturels (une démarche globale est nécessaire autant pour faire un diagnostic correct du problème que pour comprendre comment y répondre adéquatement).
- La continuité : Implique que toutes les informations pertinentes nécessaires soient disponibles pour être prises en considération au moment adéquat par les dispensateurs appelés à soigner l’individu, tant au niveau des soins de base qu’au niveau spécialisé (la responsabilité de la continuité relève essentiellement de l’échelon primaire et du patient lui-même).
- L’intégration : Elle articule le curatif et le préventif. Elle peut se traduire de deux manières : la coexistence, dans le même service, d’activités curatives, préventives, d’éducation à la santé, de revalidation et/ou la coordination avec d’autres services.
- L’accessibilité : L’accessibilité fait référence à la possibilité pour un patient de recevoir les soins à un coût (accessibilité financière), un endroit (accessibilité géographique), un moment et dans des conditions raisonnables.
- La légitimité : La légitimité définit l’harmonie de la pratique par rapport aux normes sociales, éthiques et culturelles des utilisateurs et de leurs familles.
- L’équité : L’équité est un attribut essentiel du système de santé, dont une des politiques généralement acceptée est la distribution des services en fonction des besoins (passer plus de temps avec des personnes qui ont des difficultés de compréhension, se déplacer à domicile pour les moins valides, accepter de soigner certaines personnes non protégées, etc.).
- La participation des patients: Elle peut aller de la simple utilisation des services à l’intervention dans la prise de décision ou dans la gestion. La participation peut prendre des formes collectives ou individuelles, être suscitée par les professionnels ou initiée par les patients.
- La subsidiarité : Le fait qu’une action soit réalisée par la personne ou le service qui le fera de la manière la plus efficiente et la plus proche des gens.
- La systématisation : Rendre une action la plus systématique possible, lorsqu’elle est pertinente.
- Le travail en équipe : L’interdisciplinarité est de plus en plus souvent citée comme un critère de qualité en soi, par la confrontation, les échanges, les comparaisons, le non-isolement qu’il génère intrinsèquement. Pour un projet particulier, l’important est qu’il soit compris, porté par l’équipe même si tous n’y participent pas activement et que les points de vue différents, voire divergents, puissent être partagés.
- La satisfaction : C’est une notion très subjective. Elle dépend de la manière dont on conçoit le travail et dont on définit ses objectifs. Elle est essentielle, car un projet risque de ne pas être maintenu à long terme s’il ne procure pas une satisfaction à l’équipe. La satisfaction de l’équipe résulte peut-être d’un accord sur les points qui précèdent ; si le projet est perçu par tous comme pertinent, efficace, global, il a des chances d’être satisfaisant. Quant à la satisfaction des patients, il est évidemment fondamental de la considérer comme un aspect de la qualité des soins (curatifs ou préventifs) et de faire appel à eux pour l’évaluer.
Tous les prestataires de la MMSP, quel que soit leur statut, s’engagent par la signature de la présente charte à adhérer et à soutenir les projets et principes qui y sont développés et à n’accomplir aucun acte ou propos qui seraient contraires à celle-ci ou aux statuts de l’ASBL MMSP.